dimanche 20 mai 2018

# Burn-Out # Hôpital

Être sage-femme … pas facile tous les jours …



Bonjour à tous, aujourd’hui petit post exutoire car je me pause énormément de questions sur l’avenir de mon métier, en tout cas en tant que sage-femme hospitalière.

Quand j’ai décidé de faire ce métier, il est vrai que je n’y connaissais pas grand-chose, je sortais d’une première année de médecine éprouvante tant sur le plan émotionnel qu’intellectuel. Je n’ai jamais vécu autant de pression et autant appris de choses par cœur qu’à l’époque.

Les études de sages-femmes se sont relativement bien passées, quelques mauvaises surprises mais rien d’infaisable. Ce que je regrette aujourd’hui c’est que pendant mes études on m’a vendu un métier magnifique, important et qu’on avait une vraie place auprès des femmes…

Mais aujourd’hui après presque 10 ans à l’hôpital je ne m’y retrouve plus. La seule chose qui me fait tenir ce sont les patientes (et heureusement mes super collègues). Au début on sort des études, on gagne de l’argent, on profite des nombreux moments de repos pour faire la fête, sortir, profiter de chaque instant. Ensuite on grandit, on achète une maison, on fait des enfants, on ne récupère malheureusement plus de la même manière.

Travailler de jour, de nuit, les week-ends, être rappelée sans cesse sur mes jours de repos, choisir entre Noël et le jour de l’an … Devoir dire à sa famille qu’on est pas disponible pour les fêtes familiales car on travaille … Aucune reconnaissance de la direction, de ces cadres, être juste un chiffre sur un planning qu’on rappelle au grès des besoins …

Alors oui je l’ai choisi ce métier, j’en suis pleinement consciente. J’adorais travailler à l’hôpital, m’occuper des patientes, les accoucher, suivre leur grossesse. J’aime toujours ça, mais ce n’est plus le cœur de mon métier à cause de cette rentabilité qu’on nous demande. Aujourd’hui plus les années passent, plus nous devons faire plus, avec moins de moyens, moins de personnels, et beaucoup plus de papiers, d’ordinateurs, d’administratif, de codage (à l’hôpital nous cotons chaque acte que nous faisons, chaque acte a un coût, et c’est comme ça que l’hôpital se fait payer).

Aujourd’hui quand je travaille sur une journée de 12h en salle de naissance, je gère 3 voire 4 patientes en même temps, avec une surveillance par heure. En plus de la surveillance clinique, il faut rapporter tout ce qu’on fait par écrit sur un dossier médical, répondre aux médecins, aux appels, faire des commandes, gérer d’autres paperasses, aider les collègues, gérer de l’administratif, mais aussi le cœur du métier gérer les patientes, le couple, la famille, les nouveau-nés, les urgences médicales, mais aussi gérer l’agressivité des gens, l’exaspération des gens qui n’en peuvent plus d’attendre (attention je ne dis pas que ce n’est pas justifié mais juste pour bien faire comprendre que l’on gère énormément de choses à la fois) … 

J’ai à peine fini un accouchement qu’une autre patiente arrive … Je prends encore ce temps de répondre à leur demande, de prendre ce temps, de rigoler avec elle, avec eux (le couple), de tout leur expliquer … A mes dépens…. Il m’arrive régulièrement de manger au lance-pierre sur mon bureau en 15min devant mon ordinateur en espérant avoir le temps de le remplir à temps avant de m’occuper de la patiente qui arrive après …et je ne compte pas le nombre de garde où j’ai à peine le temps d’aller aux toilettes 1 voire 2 fois (mais ça c’est du luxe) ….

Je pensais qu’en faisant des consultations donc du suivi de grossesse j’aurai plus le temps mais même ça ils nous l’ont enlevé. Sous prétexte que la demande est plus forte, on nous a enlevé du temps de consultation. Mais nous devons toujours faire le même travail avec moins de temps, comment cela est-ce possible ?? Je dois enlever quoi dans ma consultation ? Dire à ma patiente, « votre projet de naissance sur lequel vous avez travaillé et longuement réfléchis et bien on verra le jour de la naissance, aujourd’hui je n’ai pas le temps » ; « Oh vous avez des questions sur votre grossesse ? Trop tard temps écoulé, on essayera la prochaine fois ».

Non je ne peux pas, je ne peux plus … J’envisage de quitter l’hôpital pour m’installer en libéral, mais au final c’est juste une fuite est ce que je trouverai ce que je veux en libéral ? Je n’en ai aucune idée … tout ce que je sais c’est qu’en libéral je ne pourrais plus faire d’accouchements, avoir ce moment si particulier que j’ai pu avoir chaque femmes, chaque couple … ça me désole, tout ça à cause d’une direction qui ne voit que par des chiffres, des taux de remplissages de lit, des chiffres et qui oublie que nous faisons face à des humains mais aussi surtout que nous sommes des êtres humains .

Je ne vois plus de solution, quand j’entends ces infirmières qui mettent fin à leur vie, ça me rend folle. Par ce que d’une part je comprends presque leur geste alors qu’il y’a quelques années je me demandais comment c’était possible d’aller aussi loin. Alors je vous rassure jamais de la vie je ne pourrai faire cela, mais je pense que le monde hospitalier est en train de s’effondrer avec violence.

J’appelle cela de la maltraitance, nous sommes maltraités, mais nous devenons nous même maltraitant. Heureusement, que les patientes sont là pour nous soutenir, mais c’est grâce à elles, à vous que je tiens le coup, vous m’apportez toutes ce qui me fait continuer. Mais pour combien de temps ?

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